Du 21 juin au 30 septembre 2025
Artiste plasticienne et écrivaine, Abel Burger construit un univers singulier à la croisée du dessin et de l’écriture. Son travail, entre intériorité et archéologie imaginaire, sera bientôt exposé au Château de Jau. Plongée dans une démarche où l’intime côtoie les mythes anciens

Un parcours entre mots et images
Avant de se consacrer au dessin, Abel Burger a longtemps été écrivaine. Ce n’est qu’avec le temps qu’un équilibre s’est installé entre les deux disciplines. Elle confie : « Je n’imagine pas l’un sans l’autre. Mon parcours artistique est celui d’un dialogue constant entre l’écriture et l’image, où se façonne un langage qui m’est propre. »
Ce langage se nourrit de souvenirs, de rêves, de fragments d’histoire. L’artiste travaille principalement sur papier, qu’elle malmène avec sensibilité : elle le déchire, le superpose, le recolle, dans un geste instinctif et organique. Crayon, pastels secs, traces de texte et collages forment un matériau brut mais habité. Plus récemment, elle a commencé à transposer ces éléments sur de grands panneaux de bois, créant ainsi des fresques qui élargissent le territoire du dessin, l’ouvrent à l’espace.
Un univers souterrain et lumineux
L’œuvre d’Abel Burger oscille entre le visible et l’invisible. Elle y cherche la trace des morts, la mémoire, la perte, mais aussi « la douceur de ce qui persiste, malgré tout. » Trois mots résument son univers : intime, souterrain, lumineux. Inspirée par les civilisations anciennes — notamment l’art étrusque, les fresques de Pompéi ou les tombeaux peints elle y retrouve un rapport sacré à la mort et à l’invisible. Ces influences se mêlent à ses paysages intérieurs, sa poésie personnelle et les lieux traversés, comme certains coins d’Italie.Dans ses œuvres, on retrouve des alphabets inventés, des visages effacés, des objets mystérieux. « Ce sont souvent des formes venues d’ailleurs — d’un rêve, d’un tombeau, d’un rite ancestral. Mais rien n’est jamais figé : chacun peut les interpréter à sa manière. »


Une exposition comme un vestige imaginaire
L’exposition au Château de Jau est née d’une invitation naturelle, nourrie par des échanges sincères avec les personnes qui animent ce lieu. L’artiste y a trouvé une résonance : « J’ai eu envie d’y créer une sorte de présence discrète, presque archéologique, comme des vestiges imaginaires. » Parmi les pièces présentées : Nuit noire Désir impérial, un grand dessin-poème mêlant écriture et forme picturale. Il fait écho à ses premiers textes, avec une force presque incantatoire.
Autre œuvre clé : Dans les pas des léopards, dessin sur un papier italien du XIXe siècle, conçu à Naples. Cette pièce marque un tournant dans sa recherche, un passage entre sa pratique d’écriture et l’exploration plastique autour de l’art étrusque. Enfin, l’entre-monde propose une plongée liturgique dans un univers souterrain, peuplé de figures mythiques comme Charun, le dieu étrusque de la mort.
De Jau à New York, un voyage artistique en expansion
Après l’été, l’artiste exposera à la Halle Saint Pierre en septembre, puis à l’Outsider Paris en octobre.L’hiver prochain, elle s’envolera pour Rome, où elle poursuivra ses recherches sur l’art antique. Au printemps, direction Lisbonne pour une résidence in situ qui mêlera dessin et céramique. Enfin, NewYork l’accueillera pour une autre résidence : une opportunité de « poursuivre cette recherche dans un contexte différent. »
Une œuvre ouverte, sensorielle, en transformation
Plutôt qu’un message, Abel Burger souhaite offrir des espaces d’émotion, des seuils de passage : « On ne sait pas très bien ce qu’il y a derrière, mais quelque chose appelle. » Sa manière de faire est empreinte de poésie vive et acérée. Elle ne cherche pas à expliquer, mais à éveiller des sensations, à faire surgir des images intérieures.